La vie des galets dans les rivières

A cause de son caractère chaotique, il est difficile d’estimer la vitesse de transport des galets de rivières, pourtant témoins de l’érosion des montagnes. Pour y parvenir, des géomorphologues du GET proposent une nouvelle méthode géochimique.

Une rivière péruvienne en tresse, l'un des sites de l'étude

 L’érosion des montagnes produit des galets qui roulent, réduisent leur taille, et finalement descendent les rivières de façon chaotique. Le mouvement de ces sédiments grossiers détermine en grande partie la forme des profils de rivières et la vitesse à laquelle l’érosion des continents répond aux changements climatiques globaux et à la tectonique. Pourtant, leur vitesse moyenne, qui traduit l’érosion des continents sur des millénaires,  est difficile à estimer. Des géomorphologues du GET proposent une nouvelle méthode fondée sur la mesure de la concentration en isotopes cosmogéniques, tels que le 10Be, dans les blocs et galets des rivières.

Les isotopes cosmogéniques (10Be, 26Al, 21Ne, …) sont produits in situ dans les premiers mètres de la surface de la terre, à un taux que l’on est capable de déterminer avec une incertitude raisonnable. Leur concentration dans les roches de surface est donc directement liée au temps pendant lequel ces roches sont restées en place. C’est cette propriété qui a donné naissance à une méthode qui a révolutionné la datation des paysages au cours des 20 dernières années. Dans le même temps, lorsque les roches s’érodent, le produit de l’érosion emporte ces isotopes, de sorte que la roche qui reste en place voit sa concentration en ces isotopes diminuer. La concentration en isotopes cosmogéniques varie donc selon que la roche est exposée en surface (l’exposition augmente la concentration), ou qu’elle est érodée (l’érosion diminue la concentration). Ce principe est appliqué aux blocs de taille métrique et aux galets dans les rivières. En première approche l’augmentation de la concentration dans des galets le long du cours de la rivière devrait permettre d’estimer depuis combien de temps ils se trouvent dans une rivière ; par contre, une concentration qui diminue,, traduirait une érosion des mêmes galets. Le problème, c’est que chaque galet a une histoire propre avec des périodes de transport et des périodes d’immobilité (par ex. s’il est stocké dans un dépôt). Si l’on veut quantifier la vitesse moyenne des sédiments avec cette méthode, il faut comprendre comment la concentration en isotopes cosmogéniques évolue pour un grand nombre de galets. Grâce à un modèle numérique du transport et de l’évolution en isotopes cosmogéniques dans des roches des rivières, on peut prédire que le principe simple énoncé plus haut reste vrai, en moyenne, pour une population de cailloux, ce qui ouvre la voie à une nouvelle méthode pour pister la lente descente des sédiments dans les rivières.

Contact : Sébastien Carretier et Vincent Regard

Sources :

Carretier, S., and V. Regard (2011). Is it possible to quantify pebble abrasion and velocity in rivers using terrestrial cosmogenic nuclides ? J. Geophys. Res., doi:10.1029/2011JF001968, in press.

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